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Infirmière en « pratique avancée » : chaque médecin établira un protocole d'organisation avec l'IPA pour préciser leur collaboration

La nouvelle version du décret sur les IPA (Infirmiers en pratique avancée), métier « intermédiaire » entre l’infirmier et le médecin était très attendue. Le point sur la situation.
Sommaire

Les formations permettant d’accéder au nouveau métier d’IPA (Infirmier en pratique avancée) sont censées commencer en septembre 2018. Une première version du décret définissant le rôle de ce professionnel avait provoqué la colère des médecins en mars 2018, inquiets à l’idée que les infirmiers puissent accomplir des missions qui leur sont pour le moment réservées. Une nouvelle version de ce texte, confirmant la place centrale du médecin dans le parcours médical du patient, vient d’être présentée par le Conseil d’État. Qu’en est-il ?

Infirmière en « pratique avancée » : chaque médecin établira un protocole d’organisation avec l’IPA pour préciser leur collaboration


Qu’est-ce que le métier d’IPA (Infirmier en Pratique Avancée)

Le métier d’IPA, qui existe déjà dans plusieurs pays comme le Canada, les États-Unis ou encore le Royaume-Uni, est un statut qui a fait son apparition lors du vote de la loi de modernisation de notre système de santé (aussi appelée « Loi Touraine »), le 26 janvier 2016.

Cette loi propose un nouveau statut d’infirmier avec des responsabilités et des compétences accrues, positionné entre les médecins et les infirmiers, accessible après une formation de niveau Master 2 et rémunéré en conséquence.

Les missions des infirmiers en pratique avancée sont définies par décret. L’idée est de pouvoir donner plus de responsabilités à des infirmiers formés et qualifiés qui pourraient assurer certaines consultations propres, suivre des patients atteints de pathologies chroniques, et même prescrire certains traitements.

L’Ordre des infirmiers a par ailleurs expliqué qu’« en raison du vieillissement de la population, de l’explosion des maladies chroniques et des polypathologies, de l’inégale répartition des médecins sur le territoire et donc du développement des déserts médicaux, les patients ont besoin de cette profession intermédiaire. De nombreux rapports et travaux l’ont affirmé, l’infirmier en pratique avancée pourrait combler un déficit dans l’offre de soins, assurer des prises en charge complexes, en particulier sur la coordination en médecine de proximité et/ou entre la ville et l’hôpital évitant ainsi des réhospitalisations dramatiques et coûteuses, ainsi que des consultations de suivi, des actes de soins, des orientations et des prescriptions permettant l’adaptation des traitements et leur observance ».

Une première version du décret sur les IPA avait suscité la crainte des médecins

La première version du décret avait suscité une grande polémique.

D’un côté, les infirmiers la trouvaient trop « restrictive » et « dénuée d’ambition », tandis que les médecins s’inquiétaient de voir les IPA réaliser des missions qui leur sont propres.

« Après avoir fabriqué la pénurie médicale, la médecine libérale, tu remplaceras... Pour moins cher », avait dénoncé un médecin.
L’un de ses confrères avait lui aussi réagi avec hostilité : « Une fois de plus, la loi de modernisation de la santé s’applique et, vise à dynamiter la médecine libérale et l’éparpiller façon puzzle ».

Une nouvelle version qui met l’accent sur le rôle central du médecin

La nouvelle version du texte présentée par le Conseil d’État renforce le rôle central du médecin. C’est lui qui prendra la décision de « confier » un malade à un IPA. Il sera aussi de sa responsabilité de décider de la « conduite diagnostique » et des « choix thérapeutiques » à adopter.

Le médecin sera également chargé d’élaborer un « protocole d’organisation » visant à « préciser les règles » de sa « collaboration » avec l’infirmier en pratique avancée.

Parallèlement, le texte précise les missions de l’IPA. Celui-ci interviendra notamment dans la « prise en charge globale des patients » dans les domaines de l’« oncologie », des « maladies rénales chroniques, dialyse, transplantation rénale », des « pathologies chroniques stabilisées », mais également dans « la prévention et les polypathologies courantes en soins primaires ».

Il pourra aussi être amené à mener des entretiens médicaux, examiner un patient, recueillir ses antécédents médicaux, renouveler ou adapter des prescriptions, demander des examens complémentaires. Toutefois, il ne pourra pas « interpréter les résultats » et prévoir un traitement en conséquence. Cette tâche reste sous l’unique responsabilité du médecin.

Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF (médecins) se réjouit : « Plusieurs de nos amendements ont été repris » et le médecin demeure le « chef d’orchestre ». Toutefois, « le modèle économique » n’est pas encore défini.

Pour son homologue de MG France, Jacques Battistoni, cette nouvelle version du décret renseigne de façon plus claire « le cadre d’exercice ». Cependant, « des inquiétudes » persistent sur le risque que les infirmiers en pratique avancée reprennent à leur compte une partie de l’activité des médecins.