Numéro unique de régulation médicale : Agnès Buzyn tranchera courant de l'été
La ministre de la Santé, Agnès Buzyn, a récemment convoqué les représentants des urgentistes et leur a demandé comment « harmoniser » et mieux « encadrer » les services d’urgence téléphoniques. Leurs propositions seront rendues au 1er juillet, mais on sait déjà que regrouper les appels d’urgence sous un numéro unique est envisagé. Un point sur la question.
Le système français d’urgence téléphonique français doit se moderniser
En décembre 2017, la jeune Naomi Musenga décédait des suites d’une défaillance multiviscérale sur choc hémorragique après que son appel n’ait pas été pris au sérieux par la plateforme téléphonique du SAMU. La jeune femme qui avait pourtant eu plusieurs services d’urgences au téléphone n’a pas reçu, à temps, l’assistance médicale dont elle avait besoin, et est décédée peu après son transfert à l’hôpital. Même si les circonstances de ce drame restent à définir, car l’enquête est toujours en cours, les services d’urgences et la ministre de la Santé souhaitent améliorer la prise en charge des appels d’urgence.
La docteur Agnès Ricard-Hibon, présidente de la société française de médecine d’urgence, assure que le décès de Naomi impose « une réflexion profonde et une nécessaire remise en question ».
Pour le docteur Ricard-Hibon, « une meilleure formation des auxiliaires de régulation médicale, à l’écoute empathique et à la gestion des appelants » est nécessaire. Elle ajoute également « et surtout, pour une régulation médicale indispensable », c’est-à-dire que les appels pour urgences médicales soient absolument traités par un médecin.
Un regroupement des appels téléphoniques est envisagé
En France, il n’existe pas moins de 13 numéros d’urgence et 450 plateformes téléphoniques recevant ces appels, du 17 pour Police Secours à des numéros plus « spécialisés » comme le 197 pour signaler un attentat ou un enlèvement, ou le 114 dédié aux personnes sourdes et malentendantes. La multitude de numéros peut prêter à confusion.
Pour Patrick Hertgen, vice-président de la fédération nationale des sapeurs-pompiers (FNSPF), « le citoyen qui appelle les secours, souvent, doit se prêter à un jeu de pistes pour arriver au bon endroit », a-t-il déclaré. Et ceci peut s’avérer problématique.
Il ajoute que « des milliers de fois par jour », les services se transfèrent des appels, et reprennent systématiquement « plusieurs fois les numéros de téléphone, les adresses, ce qui est une perte de temps », notamment lorsqu’il s’agit d’une « urgence vitale », a-t-il poursuivi.
La FNSPF se positionne donc en faveur du numéro unique 112, qui est déjà utilisable partout en Europe, afin « que les services qui répondent à ces appels d’urgence se regroupent sur des plateformes communes et travaillent les uns à côté des autres. »
Pour la FNSPF, si « tous les cas nécessitant une intervention immédiate » étaient reçus au même endroit, cela faciliterait « le parcours téléphonique des citoyens » et en situation de crise majeure, comme lors d’un attentat, « la coordination et l’échange d’informations » entre les services seraient également optimisés.
Agnès Buzyn n’a pas encore tranché
Tous les responsables des services d’urgence ne sont pas favorables à un numéro d’appel unique, c’est pourquoi, dans un premier temps, la ministre de la Santé attend le rapport qu’elle a demandé en janvier 2018 aux représentants des services d’urgences qui doit être rendu « avant l’été ». Elle attend notamment un « état des lieux de ce qui se passe dans les autres pays », particulièrement sur ce qui existe déjà en Europe pour « voir les inconvénients et les bénéfices » , a-t-elle dit. « Il y a un inconvénient, c’est que quand vous avez un appel unique, vous avez plusieurs relais avant que la personne trouve le bon interlocuteur », a-t-elle pointé.
Dans le cas d’un regroupement des appels, 2 solutions sont envisageables : « regrouper tous les appels d’urgence », des pompiers, du Samu, et de la police, « dans un seul numéro, comme le 911 aux États-Unis » tout en mettant en place d’autre part « un autre numéro d’appel pour la régulation médicale banale », ou alors de « regrouper sous un même numéro tout ce qui concerne la santé » que cela soit « très urgent » ou pas, a-t-elle expliqué.
Thomas Mesnier (LREM) préconise l’utilisation du 15 comme numéro unique
M. Mesnier, qui est député LREM, mais aussi médecin urgentiste, a rendu son rapport le 22 mai 2018, un rapport qui vise notamment à apporter des solutions pour désengorger les urgences médicales.
En effet, le rapport indique que 43 % des passages aux urgences pourraient être évités, car ils concernent, en fait, la médecine ambulatoire. Le député fait donc des propositions pour mieux orienter les patients. Parmi elles, le regroupement des appels sous un numéro unique, le 15, dont la plateforme sera chargée de faire le tri entre les urgences réelles et les cas qui peuvent attendre.
Ce numéro ne concernerait que la régulation médicale, car, selon le député, c’est un sujet « très différent de la police et des pompiers »
Quant aux 4 syndicats principaux de médecins libéraux, ils estiment, eux, que « la seule mesure à même de résoudre le problème d’engorgement chronique des urgences » est « la mise en application du numéro national unique 116 117 »
« Les professionnels ne sont pas d’accord entre eux », mais « des décisions seront prises dans le courant de l’été » a déclaré la ministre de la Santé. A noter également que le président de la République a prévu de présenter sa réforme du système de santé début juin.