Des parlementaires proposent « une Charte du numérique »
La députée Paula Forteza (LREM), le sénateur Christophe-André Frassa (LR) ainsi que 17 autres élus ont proposé une Charte numérique à adosser à la Constitution, suite à la mission dont ils avaient été chargés à la fin du mois de mai, celle de travailler sur les droits et libertés des citoyens à l’ère du numérique. Le Président de la République a déjà fait savoir qu’il souhaitait une révision constitutionnelle à ce sujet. Un point sur ce projet.
Un ajout à la Constitution française
Les députés ont récemment transmis les conclusions de leur travail à la presse et y ont joint une « Charte du numérique » contenant 7 articles. Ce n’est qu’une « première version », car cette Charte sera probablement appelée à être modifiée au long de son parcours législatif, notamment en commission, avant d’être adoptée. Ses articles pourraient par exemple être repris sous la forme d’amendements dans le projet de loi constitutionnelle.
« Cette réflexion constitue une base de travail intéressante dans le cadre des réflexions institutionnelles », a ainsi expliqué le président de l’Assemblée nationale François de Rugy.
L’examen de cette proposition de Charte commence mardi 26 juin en commission à l’Assemblée, puis en juillet dans l’hémicycle et à la rentrée au Sénat. Ce nouveau texte pourrait rejoindre les 4 textes qui constituent la base juridique suprême : la Constitution (1958), la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (1789), le Préambule de la Constitution (1946) et la Charte de l’environnement ajoutée en 2004.
Que contient la Charte du numérique ?
La Charte défend les « principes d’un internet neutre, ouvert et non centralisé » et tend à faire reconnaitre « l’égalité des personnes et des territoires face au numérique ».
Article 1 : la loi garantit à toute personne un droit d’accès aux réseaux numériques libre, égal et sans discrimination.
Article 2 : dans les limites et les conditions fixées par la loi, les réseaux numériques sont développés dans l’intérêt collectif et respectent le principe de neutralité qui implique un trafic libre et l’égalité de traitement.
Article 3 : le numérique facilite la participation de toute personne à la vie publique et l’expression des idées et des opinions.
Article 4 : toute personne a le droit, dans les limites et les conditions fixées par la loi, d’accéder aux informations détenues par les autorités publiques ou utiles à un débat d’intérêt public et de les réutiliser.
Article 5 : la loi garantit à toute personne la protection des données à caractère personnel qui la concernent et le contrôle des usages qui en sont faits.
Article 6 : toute personne a le droit à l’éducation et à la formation au numérique et à son utilisation.
Article 7 : la présente Charte inspire l’action européenne et internationale de la France.
Pourquoi le principe de neutralité d’internet est-il important ?
Certains principes repris dans cette Charte figurent déjà au Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD) et les droits français et européen reconnaissent le principe de neutralité du Net.
Mais la pression constante des lobbies des opérateurs de télécommunications pourrait en venir à menacer ce droit fondamental.
Concrètement, en France, la neutralité du Net est la norme, c’est-à-dire que chaque citoyen, chaque client de n’importe quel opérateur peut accéder à tout le contenu internet qu’il souhaite, qu’il s’agisse d’information, de musique, de vidéos…
Si la neutralité du Net était remise en question, certains opérateurs pourraient vous demander un prix plus élevé pour un accès illimité à tous les types de contenu, ou ne vous donner qu’un accès illimité à YouTube et pas au reste d’internet comme cela s’est vu chez SFR il y a quelques années.
On peut alors imaginer le « filtre » qui pourrait être mis sur certains types de contenu, où par exemple les réseaux sociaux seraient gratuits, mais les recherches sur Google payantes, et les conséquences que cela pourrait avoir sur le traitement, la diffusion et la perception de l’information.
La neutralité du Net n’est d’ailleurs pas obligatoire dans tous les pays, un opérateur portugais proposait d’ailleurs à une époque des forfaits téléphone avec internet illimité seulement pour les réseaux sociaux, mais avec très peu de « datas » pour accéder aux autres sites.
C’est pourquoi il parait important de consolider la protection des droits et libertés de chacun face au numérique et de l’inscrire clairement à la constitution.