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La levée du secret médical autorisée en cas de violences conjugales

Un texte de loi permet de lever le secret médical en cas de violences conjugales mettant en danger la vie d’une patiente.
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Après le vote à l’unanimité du Sénat, le Parlement a définitivement adopté, mardi 21 juillet, une loi visant à mieux « protéger les victimes de violences conjugales ». Elle permet notamment aux professionnels de santé de lever exceptionnellement le secret médical.

La levée du secret médical autorisée en cas de violences conjugales

L’exception au secret médical : une mesure contestée

Le texte adopté mardi 21 juillet par le Parlement a été voté à l’unanimité aussi au bien au Sénat qu’à l’Assemblée nationale. Il permet notamment aux médecins et à tous les professionnels de santé de faire une exception au secret médical, lorsqu’ils estiment « en conscience » que la vie de la victime est mise « en danger immédiat » par les violences subies, et qu’une situation d’emprise est constatée.

En 2019, 149 femmes ont été tuées par leur conjoint ou leur ex-conjoint. Depuis le début de l’année 2020, l’AFP a recensé 39 féminicides, dont deux la semaine passée. « Nous ne pouvons demeurer inertes face à ces tragédies humaines », a déclaré face aux députés Élisabeth Moreno, nouvelle ministre déléguée à l’Égalité entre les femmes et les hommes.

Pourtant, de nombreuses voix se sont élevées contre cette disposition permettant de lever le secret médical. Parmi elles, Emmanuelle Piet, médecin de la PMI (Protection maternelle et infantile) et présidente du CFCV (Collectif féministe contre le viol), interviewée fin 2019 par France Info. « Le risque, c’est que la patiente ne vienne plus nous parler et qu’elle se mette encore plus en danger. Si elle avait l’habitude de venir se confier et qu’elle se met à avoir peur que l’on parle, elle ne viendra plus. Et là, cela devient dangereux » a-t-elle expliqué.

Un avis partagé par le médecin généraliste Gilles Lazimi, qui a déclaré mercredi 22 juillet au micro de RMC : « C’est une mesure de bonne intention qui est malheureusement inutile. Car il est déjà autorisé de déroger au secret médical si la personne est vulnérable ou s’il y a un danger vital. » Il craint par ailleurs que cette mesure ne brise la confiance des femmes victimes de violences conjugales envers les médecins. « Quand on accompagne une victime de violences, il faut la considérer, la respecter, faire avec elle. On ne fait pas le bien des gens sans eux », a-t-il ajouté.

Des peines alourdies en cas de harcèlement au sein du couple

Par ailleurs, le texte de loi prévoit également un alourdissement des peines en cas de harcèlement au sein du couple. 10 ans d’emprisonnement sont prévus à l’encontre de l’auteur des faits si le harcèlement a mené sa victime au suicide ou à une tentative de suicide.

La lutte contre les « cyberviolences conjugales » est également inscrite dans cette loi : la géolocalisation d’une personne sans son consentement est interdite, de même que la violation du secret des correspondances par un conjoint ou un ex-conjoint.

Critiqué en raison de ses prises de positions passées, le nouveau garde des Sceaux Éric Dupond-Moretti a déclaré « sa détermination à mener une lutte sans merci contre le fléau des violences au sein du couple. » Il a également annoncé ses intentions : « Je poursuivrai les travaux engagés par mon ministère dans le cadre du Grenelle des violences conjugales et j’ouvrirai si nécessaire de nouveaux chantiers. »

Par ailleurs, Marie Mercier, rapporteure du texte au Sénat, a indiqué la nécessité de poursuivre le travail. « La lutte contre les violences conjugales ne peut passer seulement par une action répressive, elle suppose aussi de mener un travail d’éducation, un travail d’accompagnement social et psychologique des victimes, mais aussi des auteurs pour prévenir la récidive », a-t-elle déclaré.