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Un produit peut être défectueux même s'il agit conformément à ce qui est annoncé

Dans un arrêt du 12 septembre 2018, la Cour de cassation apporte une nouvelle précision s’agissant de la responsabilité du fait des produits défectueux.
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Un produit de santé peut être considéré comme défectueux même si la notice comporte une mise en garde contre le risque encouru. Telle est la solution récemment dégagée par la 1re chambre civile de la Cour de cassation.

Un produit peut être défectueux même s’il agit conformément à ce qui est annoncé

Qu’est-ce qu’un produit défectueux ?

En l’espèce, une patiente est décédée d’une embolie pulmonaire à la suite de la prise d’une pilule contraceptive. Le lien de causalité entre l’absorption du produit et la survenance du décès a été établi par une expertise judiciaire. Seul le caractère prétendument défectueux du contraceptif oral faisait l’objet de débats devant la Cour de cassation. La question était notamment de savoir si la mise en garde, dans la notice du produit, contre le risque thromboembolique et la survenance possible d’une embolie pulmonaire, suffisait à écarter son caractère défectueux. Autrement dit, le fabricant peut-il éviter d’engager sa responsabilité en mentionnant les nombreux effets indésirables que peut entraîner l’utilisation de son produit ?

La cour d’appel a mis hors de cause le producteur estimant que le produit ne pouvait être considéré comme défectueux puisqu’une notice mentionnant les effets indésirables dont faisait partie l’embolie pulmonaire l’accompagnait. Ce raisonnement se fondait sur l’article 1245-3 du Code civil qui dispose qu’un produit est défectueux dès lors qu’il n’offre pas la sécurité à laquelle on peut s’attendre. L’alinéa 2 de cet article ajoute qu’il faut notamment tenir compte de la présentation du produit.

La Cour de cassation a cassé l’arrêt d’appel précisant que la gravité des effets indésirables caractérise un produit défectueux bien qu’ils soient conformes au risque annoncé. Les juges du fond auraient dû s’assurer que la gravité du risque encouru n’excède pas les bénéfices attendus de la pilule contraceptive en cause.

Rappel de l’exigence de la double preuve

Lorsque le dommage subi par la victime est lié à un produit défectueux, cette dernière peut demander réparation de ce préjudice en invoquant la responsabilité du fait des produits défectueux du producteur. Pour rappel, cette responsabilité trouve son origine dans la directive 85/374/CEE du 25 juillet 1985 transposée en droit interne par la loi du 19 mai 1988 désormais inscrite aux articles 1245-1 et suivants du Code civil.

La Cour exige l’apport d’une double preuve. D’une part, la victime doit démontrer la défectuosité du produit. D’autre part, le caractère défectueux doit être à l’origine du dommage dont elle demande réparation. La seule implication du produit dans la survenance du dommage ne suffit pas à démontrer son défaut. Cette double preuve est imposée par l’article 1245-8 du Code civil. Sans ces preuves, la responsabilité du producteur ne peut être engagée.

Ainsi, dans cet arrêt du 12 septembre 2018, la Cour de cassation rappelle que si le défaut, même annoncé dans la notice, est trop important, le produit est considéré comme défectueux. La juridiction a d’ailleurs retenu à plusieurs reprises le caractère défectueux d’un produit lorsque la notice ne précisait pas suffisamment les risques inhérents et les précautions à prendre lors de son utilisation.