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L'indemnisation d'une victime d'agression n'est pas toujours envisageable

Suite à une agression, la victime peut demander réparation du préjudice corporel subi auprès de la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infraction (CIVI). Cependant, sachez que tous les préjudices ne sont pas indemnisables.
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Pour être indemnisée en cas d’agression, la victime doit rapporter la preuve de sa réalité et l’étendue des dommages. Par ailleurs, l’indemnisation peut être réduite, voire refusée, en cas de faute de la victime. Ces règles sont rappelées dans un arrêt rendu par la Cour de cassation le 14 juin 2018. En cas d’agression, deux aspects sont à distinguer : la poursuite de l’auteur et l’indemnisation de la victime.

L’indemnisation d’une victime d’agression n’est pas toujours envisageable


La poursuite de l’auteur de l’infraction

Tout d’abord, en cas d’agression, la victime doit porter plainte auprès de la gendarmerie ou d’un commissariat afin d’en informer le Procureur de la République. Cette plainte est essentielle pour la préservation de ses droits et établir l’existence d’une infraction. Pour rappel, le délai de prescription pour porter plainte est de six ans pour les délits et vingt ans pour les crimes.

A l’issue de l’enquête déclenchée par la plainte, le Procureur peut décider de poursuivre l’auteur de l’infraction ou de classer l’affaire sans suite. La victime peut aussi se constituer partie civile afin de demander une indemnisation pour le préjudice subi. Cependant, cette voie reste bien souvent infructueuse en raison de l’insolvabilité de l’auteur des faits. Il est donc préférable de demander une indemnisation auprès de la Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infraction (CIVI).

Quel est le rôle de la CIVI ?

Cette Commission statue sur les demandes d’indemnisation formulées par les victimes d’agression ou leurs ayants droit. Elle peut aussi être saisie si l’auteur de l’infraction n’a pas été retrouvé ou s’il n’est pas solvable. Dans ce cas, la CIVI pourra, sous certaines conditions, avancer les indemnités au nom de la solidarité nationale.

Lorsque celle-ci se déclare incompétente, la victime peut se tourner vers le Service d’aide au recouvrement des dommages et intérêts pour les victimes d’infractions (SARVI) dont les conditions d’intervention sont moins strictes. La CIVI est composée de deux magistrats et d’une personne qualifiée pour résoudre les problèmes des victimes d’infraction.

Les démarches pour saisir la CIVI

La Commission d’Indemnisation des Victimes d’Infraction doit être saisie dans un délai de 3 ans suivant l’infraction ou dans un délai d’un an après la dernière décision de justice lorsqu’une procédure judiciaire a été engagée.

La demande d’indemnisation est à adresser par écrit auprès de la CIVI du domicile du demandeur ou du lieu des poursuites pénales. Il est possible d’obtenir ses coordonnées auprès de chaque Tribunal de Grande Instance (TGI).

La lettre doit être adressée au secrétaire de la Commission en expliquant les faits, votre situation suite à l’accident, le préjudice subi. Pensez à joindre l’ensemble des justificatifs nécessaires et notamment les certificats médicaux.

L’intervention d’un avocat auprès de la CIVI n’est pas imposée mais conseillée en cas de préjudices importants.


Les conditions d’intervention de la CIVI

Peuvent être indemnisées : les victimes d’une agression à l’origine d’une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail d’au moins un mois, les victimes d’un viol, d’une agression sexuelle ou d’un attentat à la pudeur, les proches de la victime lorsque celle-ci est décédée suite à une infraction.

Dans un arrêt rendu le 14 juin 2018, la Cour a appliqué le refus d’indemnisation à la victime d’une tentative d’assassinat gravement blessée dans la rue. Elle a estimé que la victime avait pris des risques en prenant part à plusieurs évènements violents quelques semaines auparavant. Elle est notamment intervenue dans une rixe entre bandes. Même si la victime affirme que cette intervention était destinée à calmer les esprits, les magistrats considèrent qu’elle entraînait un risque de représailles. Ainsi, le demandeur a pris un risque inconsidéré excluant toute indemnisation, conformément à l’article 706-3 du Code de procédure pénale qui précise que « la réparation d’un préjudice peut être refusée ou son montant réduit à raison de la faute de la victime ».

Une fois qu’elle réceptionne la demande de la victime et son dossier complet, la CIVI le transmet sans délai au FGTI (Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d’autres infractions) qui doit procéder à l’instruction du dossier et proposer une offre d’indemnisation dans un délai de deux mois. Depuis la loi du 9 mars 2004, c’est bien le FGTI et non la CIVI qui assure la fonction d’évaluation monétaire des préjudices. La CIVI conserve toutefois un rôle d’homologation. Lorsque les préjudices subis sont importants, il peut être demandé à la victime de réaliser une expertise médicale judiciaire afin d’évaluer leur étendue. Le calcul de l’indemnisation sera réalisé à partir des conclusions rendues dans ce rapport.

Suite au dépôt du rapport d’expertise médicale judiciaire par les médecins experts, deux situations sont possibles : l’état de la victime peut encore évoluer ; la victime est consolidée. Dans le premier cas, elle pourra alors réclamer des provisions dans l’attente de la consolidation. Si son état n’évolue plus, il sera possible de demander une indemnisation du préjudice. La victime aura alors le choix d’accepter l’offre d’indemnisation émise par le FGTI ou de refuser. Si elle refuse, la CIVI retrouve sa compétence par l’intermédiaire d’une procédure contentieuse. Une fois la décision de la Commission rendue, la victime aura la possibilité de la contester devant la cour d’appel dans un délai d’un mois à compter de sa notification tout comme le FGTI.