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Harcèlement moral au travail : comment réagir ?

Vos conditions de travail se sont dégradées, suite à la conduite abusive d’un collègue ? Le harcèlement moral est puni par la loi. Comment y mettre un terme ?
Sommaire

Les relations professionnelles peuvent être conflictuelles, sans que cela ne relève nécessairement d’une situation abusive. Cependant, lorsqu’un individu prend de manière systématique le pouvoir sur l’autre, au point d’en dégrader ses conditions de travail, la question du harcèlement moral se pose. Quels sont les signes qui doivent alerter, et comment y faire face ? On fait le point dans cet article.

Harcèlement moral au travail : comment réagir ?



Harcèlement moral : définition

Les salariés doivent se sentir en sécurité sur leur lieu de travail. L’employeur a une double responsabilité : il doit prévenir et faire cesser les agissements mettant en danger les employés. Cela inclut notamment le harcèlement sexuel et le harcèlement moral.

Le Code du travail caractérise le harcèlement moral au travail comme des actes répétés susceptibles de porter atteinte aux droits et à la dignité d’un salarié, mais également d’altérer sa santé physique ou mentale, et de dégrader ses conditions de travail (article L1152-1). Au carrefour entre le domaine éthique, judiciaire et médical, il est parfois concrètement difficile à identifier et à prouver.

Considéré en France comme un délit par l’article 222-33-2 du Code pénal, le harcèlement moral au travail est passible de 2 ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Encore tabou, ce phénomène fait pourtant l’objet de chiffres alarmants : selon le baromètre national du harcèlement au travail de septembre 2022, 1 salarié sur 3 a été victime de harcèlement moral et 4 salariés sur 10 en ont été témoins. Presque 50 % des personnes sont mal informées sur le sujet (44 % des salariés interrogés) et beaucoup peinent à identifier les situations de harcèlement moral au travail.

Des pistes pour reconnaître une situation de harcèlement moral au travail

Le harcèlement moral s’inscrit toujours dans la régularité, mais prend des formes diverses et variées. Du dénigrement aux brimades en passant par les menaces, la mise à l’écart, ou les intimidations physiques, les agissements sont multiples, et parfois même, subtils. Si bien que la victime en vient à douter de ses ressentis. Voici donc quelques exemples qui peuvent vous mettre la puce à l’oreille :

  • Il vous critique sans cesse : le harceleur trouve perpétuellement une bonne raison de vous faire des reproches. Quoi que vous fassiez, il a toujours quelque chose à redire. Il ne juge d’ailleurs pas seulement vos compétences professionnelles, mais qui vous êtes en tant que personne.
  • Il souffle le chaud et le froid : le harceleur n’agit pas toujours de façon linéaire. Selon les circonstances, il peut se montrer mielleux ou glacial. Il change de visage en public, et sait généralement se faire apprécier du plus grand nombre, ce qui lui confère une certaine « légitimité ».
  • Il cherche à vous isoler : le harceleur tente de vous faire publiquement perdre toute crédibilité. Il use alors allègrement des plaisanteries douteuses comme des remarques malveillantes. Il n’hésite pas à monter les autres contre vous, afin de vous faire croire que vous êtes le problème.
  • Il vous confie des objectifs irréalisables : le harceleur a tendance à demander la lune. Il vous place dans des configurations sans issue, ce qui implique des situations d’échec à répétition. Malgré tous vos efforts, il est impossible de le satisfaire, car il n’y a jamais de « bonne réponse ».
  • Il engendre un profond malaise : vous ne savez pas toujours précisément pourquoi, mais la simple présence du harceleur engendre chez vous un mal-être intense et systématique. Petit à petit se crée une véritable appréhension, au point de vous rendre au bureau la boule au ventre.

Les conséquences du harcèlement moral

Le harcèlement moral au travail n’est pas à prendre à la légère. Il engendre chez la victime une réelle souffrance, dont les retentissements peuvent être physiques comme psychologiques, et ce parfois même à long terme...

Dans un premier temps, il est principalement question de stress, qui peut se manifester par des troubles alimentaires, des troubles du sommeil, de l’irritabilité, de la fatigue chronique, une hypervigilance, ou une consommation de stupéfiants.

Cependant, si la situation de harcèlement perdure, peuvent naître des troubles psychiques ou psychosomatiques. Dépression, pensées suicidaires, burn-out, perte de confiance en soi, crises d’angoisse, conduites addictives… voici autant de maux qui peuvent découler d’une relation toxique à long terme.

Harcèlement moral au travail : comment réagir ?



Que faire en cas de harcèlement moral en milieu professionnel ?

Réunir des preuves

Prouver une situation de harcèlement moral est complexe, car les agissements néfastes sont souvent oraux et informels ! Pour autant, si vous estimez être victime de harcèlement au travail, et que vous souhaitez obtenir gain de cause devant les tribunaux, il est important d’appuyer vos dires sur des éléments concrets

Ainsi, n’hésitez pas à précieusement garder toute trace écrite susceptible de témoigner du comportement toxique du harceleur à votre égard. Mails, SMS, courriers manuscrits, ou même conversations sur les réseaux sociaux… n’ayez pas peur d’éplucher les moindres détails de vos échanges.

Si les actes de harcèlement se sont déroulés devant d’autres personnes, il est capital de recueillir leurs témoignages. La parole de collègues, d’anciens collègues, de clients, ou encore de prestataire peut véritablement peser dans la balance !

Enfin, les documents médicaux, comme les arrêts maladie, les ordonnances et les certificats, sont aussi des preuves à ne pas négliger. Un professionnel de santé peut tout à fait attester d’une altération physique ou mentale de son patient. Il est en droit de présumer d’une situation de harcèlement moral, tant qu’il ne la qualifie pas.

Attention, il faut savoir que les enregistrements audio et vidéo obtenus sans consentement ne sont pas légaux, et donc pas recevables devant le conseil de prud’hommes. Le tribunal correctionnel peut cependant, dans certaines situations, les prendre en compte…

Prévenir son employeur

Le saviez-vous ? La loi oblige l’employeur à prendre les mesures nécessaires pour prévenir le harcèlement moral dans son établissement, et sensibiliser les salariés à la question du harcèlement. Par ailleurs, nul ne peut être sanctionné pour avoir dénoncé une situation de harcèlement moral au travail. Face à un signalement, l’employeur se doit de réagir de manière rapide et efficace, notamment en ouvrant une enquête interne, et en prenant les décisions disciplinaires adéquates.

Si vous vivez une situation de harcèlement en milieu professionnel, que ce soit de la part d’un collègue, ou d’un supérieur hiérarchique, il est donc indispensable d’en informer le chef d’entreprise ! Ce signalement peut s’effectuer par le biais d’un courrier recommandé avec accusé de réception. Il est possible, en complément d’une trace écrite, de solliciter un entretien pour en échanger de vive voix.

Alerter le comité social et économique

Dans le cas où vous ne seriez pas entendu par votre employeur, des recours pour signaler une situation de harcèlement moral existent. Parmi eux, on compte le comité social et économique (CSE), une instance unique de représentation du personnel dont la présence est obligatoire dans toutes les entreprises d’au moins 11 salariés. Le rôle du CSE est, entre autres, de défendre les intérêts des salariés, et de veiller à leur santé, leur sécurité, et leurs bonnes conditions de travail.

Contacter l’inspection du travail

L’inspection du travail fait également partie des interlocuteurs possibles en cas de harcèlement moral. Ce service a pour mission de s’assurer de la bonne application du Code du travail dans les entreprises. Les contrôleurs de l’inspection du travail sont en droit de pénétrer librement, et sans avertissement préalable, au sein d’un établissement, dans l’objectif d’y mener une enquête.

Engager une procédure de médiation

Si vous souhaitez tenter une conciliation avec l’autre partie pour mettre fin au harcèlement moral, vous pouvez proposer une procédure de médiation à l’auteur du harcèlement.

Important : les deux parties doivent se mettre d’accord pour choisir le médiateur.

Le médiateur peut faire des suggestions, telles qu’un changement de poste du harceleur, pour faire cesser complètement le harcèlement et protéger la victime. Si la conciliation échoue, le médiateur vous expliquera comment faire valoir vos droits en justice.

Faire appel au conseil de prud’hommes

Notez que vous disposez également d’un délai de 5 ans après les faits de harcèlement moral pour saisir le conseil de prud’hommes. Cette juridiction de premier degré peut vous permettre d’obtenir réparation du préjudice subi. La procédure auprès des prud’hommes ne peut que vous opposer à votre employeur, et non à un autre employé de l’entreprise, et elle nécessite l’apport de preuves.

Saisir le juge pénal

Enfin, il est possible de passer en pénal, en déposant une plainte contre le harceleur. Celle-ci devra également s’accompagner de preuves, afin qu’une enquête soit ouverte, et qu’un jugement puisse avoir lieu. Vous disposez d’un délai de 6 ans après les faits pour effectuer cette démarche. Il est recommandé d’être accompagné d’un avocat, ou de se faire représenter par un syndicat.

Secteur public

Si vous travaillez dans le secteur public, vous pourrez saisir le tribunal administratif, en fournissant des preuves directes et indirectes, au lieu du conseil de prud’hommes.

 

Pour prévenir le harcèlement moral sur le lieu de travail, vous pouvez lancer des campagnes de sensibilisation, mettre en place des dispositifs de signalement et de soutien psychologique.

Oui, l’auteur de harcèlement moral peut être sanctionné à la fois par l’employeur (mutation, mise à pied, licenciement) et par la justice (peine de prison, amende, dommages-intérêts).

Pour prouver un harcèlement moral, vous pouvez, entre autres, présenter des témoignages de collègues, un certificat médical, des SMS ou des e-mails, des résultats d’évaluation ou des comptes rendus de réunions des représentants du personnel.