L'abandon de poste, est-ce une démission ? Le Conseil d'État a rendu sa décision
C’était une décision attendue. Saisi par plusieurs syndicats, le Conseil d’État a rejeté la demande d’annulation du décret portant sur l’application de l’abandon de poste. Toutefois, la plus haute juridiction administrative rappelle que le salarié doit être préalablement informé des conséquences que peut avoir une absence de reprise de travail sans motif légitime.

L’abandon de poste a été instauré par une loi de 2022
Une loi adoptée en décembre 2022 introduit un mécanisme inédit dans le droit du travail. La présomption de démission vise à encadrer les cas d’abandon de poste, permettant à l’employeur de considérer l’attitude du salarié comme une rupture volontaire de contrat. Le décret du 17 avril 2023 en a fixé les modalités précises, renforçant l’obligation de mise en demeure avant toute décision.
Ainsi, un salarié qui abandonne son poste doit être mis en demeure par son employeur, lequel lui laisse un délai minimal de 15 jours pour justifier son absence ou reprendre son activité. Ce délai est calculé à partir de la réception de la mise en demeure, envoyée par lettre recommandée ou remise en main propre. Et si le salarié ne revient pas à la fin du délai, son abandon de poste est considéré comme étant une démission. Il ne peut donc pas percevoir les allocations chômage. Toutefois, le salarié peut saisir le conseil de prud’hommes pour contester cette rupture.
Bon à savoir : il n’y a pas d’abandon de poste si le salarié se met en grève, exerce son droit de retrait, refuse d’exécuter une instruction qui est contraire à une réglementation, refuse une modification de son contrat de travail à l’initiative de son employeur ou quitte son travail pour consulter un médecin.
Pourquoi le Conseil d’État a rejeté la demande d’annulation ?
« Le Conseil d’État relève tout d’abord que le décret attaqué se borne à fixer les modalités d’application de la loi et ne peut donc être regardé comme un projet de réforme », écrit la plus haute juridiction administrative. Cela signifie donc qu’aucune concertation préalable n’était obligatoire.
Par ailleurs, les syndicats déploraient que ces textes ne permettent pas de bénéficier des garanties prévues par la convention internationale du droit du travail numéro 158 sur le licenciement. « Cette convention ne couvre cependant que la cessation de la relation de travail à l’initiative de l’employeur et non les situations de démission volontaire », indique le Conseil d’État. « Elle n’est donc pas applicable », car en cas d’abandon de poste, « c’est en réalité le salarié (…) qui est à l’initiative de la rupture de la relation de travail ».
Enfin, concernant le délai minimum de 15 jours accordé aux salariés, le Conseil d’État estime que « le décret fixe pour ce délai minimum une durée et un point de départ clairs, qui ne sont ni contraires à la loi ni manifestement erronés ».
À noter : dans une décision concernant l’abandon de poste dans la fonction publique, le Conseil d’État avait déjà jugé que l’employé devait obligatoirement être informé des conséquences que pouvait avoir l’absence de reprise du travail sans un motif légitime.